« Wow! Ça doit demander énormément d’assurance de faire ce que tu fais! C’est incroyable d’avoir autant de confiance en soi! En tout cas, moi, j’en serais jamais capable! Bravo! »
Voici ce qu’une très gentille demoiselle m’a confié un soir, après l’une de mes performances burlesques. Je l’ai regardé dans les yeux avec un gros pincement au cœur qui m’a empêché de dire autre chose qu’un simple merci.
Mais, je peux bien vous le dire à vous. Je m’appelle Valérie, j’ai 25 ans, je suis actrice et artiste burlesque… et je n’ai absolument aucune idée de ce qu’est l’assurance.
Au risque de faire ressembler mon texte à une confession plutôt qu’à un texte d’opinion, je ressens le besoin, plus que jamais, d’exprimer qu’il n’y a probablement personne sur terre que je peux détester plus que ma propre personne.
Prôner l’acceptation du corps et ne pas être capable d’accepter le sien, tu parles d’une intégrité.
Comme dans l’expression « un cordonnier mal chaussé », je me sens constamment dans la peau d’une grande imposteur. Mais de se montrer les foufounes sur une scène ne vient pas automatiquement avec toute l’assurance du monde.
Comme quoi, faire partie du milieu n’est pas un vaccin contre les troubles de l’estime de soi. Souvent, c’est même complètement le contraire.
Au théâtre, me cacher derrière un personnage m’aide à dissocier ce à quoi je ressemble de ce à quoi j’aimerais ressembler. L’espace d’une représentation, du moins. Le problème c’est que maintenant je joue toujours à faire semblant. J’ai appris à me servir de ma passion comme d’une belle grosse carapace pour cacher, sur scène comme dans la vraie vie, ce que je pense réellement de moi.
Je revêts chaque jour cette belle robe qu’est l’assurance, en prenant bien soins de cacher à tout le monde qu’elle n’est fait que de synthétiques.
Ça fait mal à dire… autant que ça doit être décevant à lire.
J’aimerais pouvoir vous dire que le burlesque a complètement effacé, d’un coup de baguette magique, tous les reproches que je peux me faire à moi-même. Que d’être confrontée à mon corps seul, littéralement mis à nu sur scène, dans un contexte où la diversité et la sensualité de tous sont au premier plan, m’a aidé à accepter qui je suis dans mon entièreté. Que d’être entourée d’une multitude de femmes inspirantes, confiantes, différentes et assumées aurait pu effectivement entrainer des résultats positifs dans ma quête d’amour propre.
Ce n’est malheureusement pas le cas… oups.
C’est dommage non? D’être aussi bien entourée, mais de refuser catégoriquement le changement!
En tout cas, c’est le cas pour le moment. J’aime croire qu’un jour j’arrêterai de me faire du mal. Parce que je refuse de rester comme ça toute ma vie. Je veux apprendre à vivre avec mon corps et à en prendre soin. Je veux arrêter de lui faire la guerre. Je veux arrêter de détester la phrase « Je suis belle comme je suis » comme si c’était un mensonge ou une défaite. Je veux un jour me dire que tout ça est derrière moi et que mon corps ne fait plus entrave à mes projets, mon bonheur, ma vie, quoi.
D’ici là, je vais essayer de faire le ménage de mon linge synthétique!
Sans rancune, mes collègues de burlesque! Vous êtes une grande inspiration, il serait juste temps que j’arrête de vous envier et que j’en prenne de la graine!
Valérie